Guérir d’un accouchement difficile

Est-il possible de finir par être en paix avec un accouchement qui n’a pas répondu à nos espoirs, à nos attentes? Comment peut-on en « guérir »?

Avant tout il faut savoir qu’une telle démarche n’est pas nécessairement facile. Il faut être prête à revivre des sentiments douloureux, comme de la tristesse, de la déception, de la colère. Des sages-femmes, doulas (accompagnantes à la naissance) et éducatrices prénatales croient qu’il est important, avant d’accoucher à nouveau, de faire, le plus possible, la paix avec la première expérience, qui peut avoir été une césarienne.

Sitôt après un événement pénible, il est fréquent que, pour se protéger de ce qui fait mal, on refuse de revenir sur ce qui s’est passé. Du moins pendant un certain temps. Certaines par exemple rationalisent l’expérience, trouvant des raisons et tentant de se convaincre que ce n’était pas si mal après tout, par exemple. Cette difficulté à faire face à ce qui est douloureux peut expliquer pourquoi on ne peut se fier entièrement aux résultats d’enquêtes menées auprès des femmes venant d’accoucher. Il est en effet rare, même si cela peut arriver, que tôt après avoir eu son bébé, une femme se rende entièrement compte de ce qui vient de lui arriver et soit en contact avec la manière dont elle a vécu l’expérience. Elle est généralement soulagée d’avoir ‘passé au travers’ cet événement nouveau, intense et exigeant, et heureuse d’avoir un bébé en santé. Alors, les ennuis causés par l’épisiotomie, les forceps, ou même la césarienne, ne pèsent pas nécessairement lourd. Et s’il s’agit d’une césarienne qui n’était pas prévue, on est plus ou moins en état de choc, dans les semaines qui suivent. Il est difficile alors d’avoir du recul. C’est souvent plusieurs mois, un an, et même des années plus tard, particulièrement lorsqu’on attend à nouveau un enfant, que les questions et émotions suscitées par un accouchement difficile refont surface, et parfois de façon inattendue.

De plus, l’adaptation à la maternité ne laisse pas beaucoup de temps, surtout s’il s’agit un premier bébé, pour réfléchir à ce qui s’est passé. On peut aussi manquer du soutien nécessaire pour faire face à des émotions pénibles. Notre partenaire ne comprend pas nécessairement pourquoi on est si affectée par l’expérience. L’entourage fait aussi souvent preuve de peu de compréhension envers les femmes déçues de leur accouchement. « Pourquoi es-tu si bouleversée ? », leur dit-on. « Tu as un bébé en santé, tu t’es bien remise, tu devrais être contente ! ».

On peut aussi ne pas être consciente de ce que l’on ressent face à un accouchement difficile. Toutefois, certains signes peuvent être révélateurs, tels éviter de voir des vidéos d’accouchement, ou un agacement face à des récits d’accouchement. Vous pourriez aussi vous demander ce que vous ressentez lorsque vous pensez à l’un ou l’autre des intervenants qui étaient présents à votre accouchement : éprouvez-vous de la colère ? avez-vous le sentiment d’avoir été abandonnée, ou trahie ?

Lorsque nos attentes les plus importantes ne se sont pas matérialisées, nous avons à faire le deuil de ce qui ne s’est pas passé. Et, comme tout processus de deuil, cela comprend différentes étapes, d’intensité variable (et l’ordre dans lequel elles se produisent peut aussi varier) :

. stupeur, état de choc

. colère, frustration, irritation, blâme

. nostalgie de ce qui n’a pas été vécu, envie face à d’autres femmes qui ont eu un accouchement plus facile

. tentatives de comprendre ce qui s’est passé, d’avoir des réponses à ses questions

. dépression : état de désorganisation, de désespoir, difficulté à s’occuper de son bébé, tensions dans la relation conjugale

. acceptation : la vie reprend son cours, on précise ce qu’on aimerait, pour la prochaine fois, on se renseigne, on se sert de sa propre expérience pour aider d’autres femmes, etc.

Certaines de ces étapes peuvent se chevaucher, se répéter. Mais la blessure ressentie, peu à peu, fait moins mal. Surtout si on trouve des personnes de confiance avec qui en parler, qui sauront nous écouter sans nous juger (au besoin on peut consulter un thérapeute) ou si on finit par mieux comprendre ce qui est arrivé. Cela aide aussi si on a du soutien réel lors d’un prochain accouchement, si on vit un AVAC, après avoir eu une ou des césariennes. N’hésitez donc pas à communiquer avec AVAC-Info, pour vous aider : chaque femme qui y œuvre, bénévolement, a vécu une césarienne. Elles savent ce que l’on peut ressentir, suite à cet événement.

Pour en savoir plus, et en particulier pour des suggestions pouvant faciliter la ‘guérison’, consulter le chapitre 4 de mon livre : La césarienne, une cicatrice émotionnelle ? (dans la version anglaise : Consider the emotional aftermath)

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Hélène Vadeboncoeur

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